Tumbak : le village sorti des eaux

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Le ferry pris depuis Katupat nous amènera à Gorontalo d’où nous prendrons la route pour huit heures jusqu’à Manado, tout au Nord de la Sulawesi. Aussitôt arrivés, on repart le lendemain même pour Tumbak avec Yoan Parizot, le permanent français de l’ONG Acroporis. Marié avec une femme de Tumbak, il rejoint sa belle-famille pour l’occasion de la fête de fin du Ramadan (Eidul Fitri). Toutes les familles se réunissent à cette occasion.

 

HoolaHoopTumbak.jpgArrivée de nuit. Toutes les maisons ou presque ont été repeintes, des fanions traversent l’air, des bougies sont allumées devant les maisons : une par habitant. « Il est beau le village comme ça. La pêche a été bonne cette année. L’année dernière, le temps ne leur avait pas permis de sortir en mer. Il n’y avait pas d’argent. Le village était triste. On n’avait pas fait la fête » commente Yoan.

 

Tumbak est un village-rue sur pilotis, construit depuis la mer en suivant une longue bande de terre qui sépare la mangrove du lagon. Il a été fondé au début du siècle dernier par une famille de bajau, une tribu de nomades de la mer de l’archipel malais que l’Indonésie a petit à petit forcé à se sédentariser. Les bajaus voyageaient traditionnellement d’îles en îles, vivant entièrement de la mer. Partout en Sulawesi, on accuse les bajaus de ne pas respecter le milieu marin comme si leur nomadisme leur avait permis jusque là de piller une zone avant d’aller voir ailleurs. Vrai ou faux, le développement de Tumbak s’est en tout cas payé d’une surexploitation de la zone : les dugongs qui vivaient sur l’herbier à l’embouchure ont été capturés jusqu’au dernier, les tortues comme les requins sont rares, les gros poissons ont été pêchés souvent à l’explosif qui a détruit presque 50% du récif, les colorés étaient eux pris au cyanure pour les aquariums. FillePriereTumbak.jpg

 

Le lendemain de notre arrivée, l’air du petit matin porte déjà l’odeur épaisse et rance de l’huile de friture. Dans toutes les maisons, on prépare les pâtisseries et les cuisinières évidemment goûtent leurs créations. C’est le dernier jour du ramadan : on n’a toujours pas le droit de manger mais c’est presque fini et Allah sera indulgent. 

 

Vendredi, nous nous levons pour la prière de l’aube qui rassemble l’ensemble du village, pour un instant vidé. Puis c’est le début du pasiar : on passe de maison en maison. On entre chez ses voisins pour un soda et une pâtisserie. On apprend à dire « mohon maaf lahir dan batin », « je demande pardon pour mes pêchés de ma naissance à ma mort ».

 

Première apnée. On se met à l’eau derrière les maisons : un tout à l’égout assez repoussant,  entre les vieux chiffons, les bouteilles de plastique. Après quelques dizaines de mètres le paysage sous-marin est pourtant extrêmement riche.

 

Isolé géographiquement, culturellement (village bajau), religieusement (c’est un village musulman d’une région majoritairement catholique), Tumbak est pour nous une perle rare du Nord de la Sulawesi.


 

Publié dans Le voyage

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